De la donnée et du Big Data est née l’intelligence artificielle Watson, capable d’établir des diagnostics ultra pointus au profit des médecins américains. Des objets connectés qui favorisent l’autodiagnostic. De la télémédecine qui permet la consultation à distance… Quel sera le rôle du médecin du futur ? Quel sera son champ d’intervention ; son rapport au patient ? Robots et Compagnie a consulté le livre blanc « Santé numérique, quelles (r)évolutions pour demain ? ». Morceaux choisis.
La donnée comme point de départ à la médecine du futur
« La donnée » est le point de départ des innovations que nous connaissons actuellement et des bouleversements qu’elles engendrent. Ces milliards de données n’étaient ni récupérables ni traitables il y a encore quelques années. L’avènement du Net, des objets connectés et du digital ont changé la donne.
Désormais, nous générons chaque jour près de 2.5 trillions d’octets de données dans le monde, soit plus d’informations produites en 48 heures qu’en 4 000 ans. Les technologies du Big Data œuvrent en ce sens puisque leur enjeu consiste à trouver des solutions pour – toujours plus et toujours mieux – collecter ces données, les stocker et les analyser en temps réel.
L’ère de « la donnée » ne fait que commencer et elle sert la médecine au-delà de tout ce que nous pouvions imaginer il y a encore quelques années.
L’intelligence artificielle Watson, le Dr House de la médecine du futur
Prenons l’intelligence artificielle (IA) baptisée « Watson », par exemple. Cette innovation est peut-être la plus folle actuellement présente dans le domaine de la médecine. Conçue par IBM, cette IA est capable d’analyser 20 millions de pages de données en moins de trois secondes pour en pointer, voire prédire une ou plusieurs tendances.
Watson est utilisé par de nombreux hôpitaux aux États-Unis pour emmagasiner les centaines de publications médicales hebdomadaires, analyser les résultats issus des dossiers des patients, identifier des corrélations entre ces informations – qu’un humain ne pourrait pas pointer, sauf à se plonger dans une analyse fine et individualisée durant de nombreuses heures.
Watson est une sorte de Dr House en 1 000 fois plus performant, si vous préférez. L’intelligence artificielle est utilisée aujourd’hui pour le domaine de l’oncologie et elle aide les spécialistes à diagnostiquer les patients.
Des objets connectés pour s’auto diagnostiquer… Et toujours plus de données pour la médecine du futur!
Dans la même mouvance, les objets connectés dédiés à la santé ont naturellement trouvé leur place. Ici, ces patients connectés sont appelés « actients » par le docteur Guy Vallancien. Les actients disposent des technologies pour mesurer eux-mêmes leur état de santé en temps réel (citons pour exemple – en vrac – les bracelets connectés pour suivre son rythme cardiaque, son sommeil, son stress et même son cycle d’ovulation ou le bon brossage de ses dents !).
Les applications dédiées aux objets connectés de santé permettent également de stocker et de suivre les données collectées (via des graphiques), pour en détecter les anomalies, établir des tendances, voire anticiper un état de santé.
Enfin, certains objets connectés de santé offrent la possibilité de transmettre les résultats à son médecin de famille pour l’aider à établir son diagnostic.
Le médecin doit intégrer toutes sortes de données personnelles pour aider le patient à guérir
« Le rôle du médecin sera à l’avenir le rôle du bioconseiller à l’écoute du patient pour l’aider à affronter le mal en intégrant toutes ses données personnelles [notamment celles issues de ses objets connectés], familiales, socioprofessionnelles, culturelles, religieuses et environnementales », raconte le chirurgien Guy Vallancien dans le livre blanc : « Santé numérique, quelles (r)évolutions pour demain ? ».
En acquérant ces nouvelles données au sujet de leurs patients, mais aussi les technologies pour les analyser en temps réel, les médecins de demain pourront poser des diagnostics sur des bases nouvelles. Leur degré d’intervention se modifie.
De l’analyse des données à la télémédecine
La médecine de demain sera aussi la télémédecine – ou médecine à distance et inversement, l’hospitalisation à domicile. La facilité de collecte et de transmission des données auprès du médecin couplé aux innovations en matière de télésurveillance permettent de plus en plus aux personnes âgées, aux personnes handicapées ou souffrant de maladies chroniques de rester chez elles tout en bénéficiant d’un suivi, à distance, certes, mais ultra pointu.
Citons comme outils de télémédecine les robots de compagnie et les robots de visioconférence destinés à évoluer au domicile du patient. Ils sont capables de communiquer avec lui, certains peuvent même de déplacer des objets (amener un verre d’eau, par exemple), collecter des données concernant son état de santé, mais aussi détecter une chute, une anomalie pour alerter le personnel soignant en cas d’urgence.
Et des hôpitaux ponctuels ?
En allant encore plus loin, nous pouvons envisager un monde où les tissus humains s’impriment en 3D en quelques heures et qu’il suffirait d’une prescription médicale pour se rendre dans un centre de bioprinting pour récupérer ses dents, ses nouveaux cheveux, ou de prendre rendez-vous dans un hôpital pour se faire implanter des tissus ou un organe défaillant.
En parlant d’hôpitaux, dans le futur ceux-ci ne seront plus le passage obligé. Ils seront réservés aux interventions précises, programmées ou urgentes. Moins imposants, construits plus vite, plus nombreux et mieux répartis sur les territoires… Pourquoi pas modulaires, voire ambulants ? Dotés de technologies de pointe, ils accueilleront les patients avec un grand confort, à l’instar du centre hospitalier de Monaco qui dispose de toutes les avancées high-tech : salles d’opération hybrides, instruments de pointe, systèmes d’informations et de communications numériques… Ne manque que les imprimantes 3D biologiques ! (Pour information, le bioprinting est encore en phase expérimentale.)
Le médecin du futur sera-t-il aussi statisticien ?
In fine, le professionnel de santé de demain sera presque autant statisticien – analyste de données que purement médecin. Il pourra, de fait, travailler à distance, sans même passer par la démarche d’auscultation. Le médecin sera le chef d’orchestre entre le patient, ses objets connectés dédiés à la santé, son robot de compagnie et ses proches impliqués ; chargé de faire le tri parmi les centaines de données apportées, de prendre des décisions à distance et de s’aider du Big Data pour affiner ses conclusions, voire les anticiper.
« Demain, le patient connecté sera capable de savoir à tout moment dans quel état de santé il se trouve. Même s’il dispose de toute la technologie pour s’autoanalyser, il aura besoin d’aide et de conseils éclairés pour prendre soin de lui et faire les bons choix, explique Thibault Vautier, directeur général d’Adecco Medical. Pour les soignants de demain, la relation au patient deviendra un élément majeur dans leur parcours professionnel. »
Et la réalité du terrain, dans tout ça ?
Médecine préventive ou prédictive, e-santé, santé connectée… Des termes qui font de plus en plus partie de notre quotidien ; amenés visiblement à bouleverser les domaines de la médecine et nos méthodes de soin, sans que l’on sache vraiment où cela nous mènera…
En conclusion, disons que la question se pose sérieusement lorsque l’on constate les déficits d’effectifs sur certains territoires désertés. Une médecine à deux vitesses serait donc en train de naître ? Qu’en sera-t-il de la relation humaine entre le médecin et le patient, un élément éminemment important dans le processus de guérison et de maintien d’une bonne santé? Voyons d’un côté la médecine connectée ultra moderne et de l’autre, loin de la Silicon Valley et des nanotechnologies, nos hôpitaux bondés et médecins de ville ou de campagne qui, faute de moyens, sont amenés à pratiquer le système D. La médecine préventive ; médecine connectée : est-ce réellement la médecine de demain ?
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